C’est dans le beau qu’on élève de belles personnes

C’est dans le beau qu’on élève de belles personnes

23/12/2025

En cette fin de mandat municipal, le CAUE a fait le choix de retrouver des élus qu’il a eu l’occasion d’épauler ces dernières années. D’ici les élections de mars 2026, vous trouverez chaque mois dans notre newsletter une interview d’un ou d’une élue iséroise racontant cette collaboration, l’occasion de rendre compte des enjeux auxquels les élus locaux sont confrontés concernant les projets d’aménagement.

Pour ce troisième portrait, nous avons rencontré Adrienne Perves, maire de Coublevie. 

Les enjeux d’aménagement ont été au fondement de l’engagement politique d’Adrienne Perves, élue pour la première fois en 2020, en embrassant d’emblée l’écharpe de maire de Coublevie : « C’est en voyant ma commune se transformer que j’ai eu envie de m’engager. Je n’avais jamais imaginé être tête de liste, mais je faisais partie en 2019 d’un groupe d’habitants qui était allé interroger les deux autres têtes de liste qui s’étaient déjà manifestées. Nous n’avions été convaincus ni par l’une ni par l’autre, donc nous avons décidé de monter notre propre liste ». 

Salariée d’une grande institution grenobloise du secteur de la recherche, Adrienne Perves avait par le passé été associée à ce titre au projet urbain de la Presqu’Ile, sans pour autant œuvrer au quotidien sur ces questions : « Je pense que, sans avoir suivi un cursus dans le domaine de l’architecture ou de l’urbanisme, ouvrir les yeux, être attentif à ce qui nous entoure nous rend sensible à l’évolution de notre cadre de vie ». 

Commune limitrophe de Voiron, intégrant un bassin de vie particulièrement dynamique, Coublevie connait depuis plusieurs années une tension foncière menant à une urbanisation parfois vécue violement par ses habitants : « Lors des élections de 2020, il y avait un consensus fort entre toutes les listes pour pointer le fait que le PLU était défaillant et qu’il fallait le réviser d’urgence. C’est un chantier que nous avons lancé dès notre élection, de manière à pouvoir le plus rapidement possible surseoir à statuer concernant les demandes d’urbanisme et mieux maîtriser cette urbanisation ». 

Ce fut aussi l’occasion d’un premier contact avec le CAUE, qui ne s’est pas révélé concluant : « Nous avions sollicité l’aide du CAUE un peu en urgence. Mais l’accompagnement proposé, qui devait se dérouler sur plusieurs mois pour recruter un bureau d’études en urbanisme, ne répondait pas à notre besoin. Nous avions comme impératif d’élaborer au plus vite un PADD, pour bloquer des éventuelles demandes d’urbanisme. Nous nous sommes donc débrouillés de notre côté pour recruter le plus rapidement possible les personnes qui ont pu nous épauler pour cette révision ». 

Le parcours d’Adrienne Perves est assez représentatif de la dynamique des communes péri-urbaines : « Je suis arrivée à Coublevie comme beaucoup de salariés de l’agglomération grenobloise, un peu par hasard en trouvant un logement qui correspondait à ce que je désirais pour faire grandir mes enfants : un hameau de la commune, avec des voisins du même âge et une nuée d’enfants libres de jouer ensemble. Nous avons la chance d’avoir la proximité de Voiron et donc l’accès à de nombreux services, tout en ayant sur notre commune un tissu associatif exceptionnel ». 

C’est ce cadre de vie proche de la nature qui l’attache fortement à cette commune : « Ce qui est merveilleux à Coublevie, c’est qu’il y a de nombreuses coupures vertes, de nombreux ‘’corridors écologiques’’ comme on dit en urbanisme. Il y a également de nombreux parcs sur le bas de la commune. Et puis surtout, il y a cet ensoleillement exceptionnel. L’hiver, ça change beaucoup les choses lorsqu’avant on habitait à Grenoble. Ici, nous n’avons pas le masque solaire du Vercors. Parfois, je quitte Grenoble en vélo, il fait nuit, et j’arrive ici, il fait encore jour. Cela dit, l’été, en période de canicule, c’est un peu plus difficile, mais huit mois de l’année, c’est un vrai bonheur ! ». 

La commune a travaillé avec le CAUE en 2022, à l’occasion de l’acquisition du couvent des Dominicains, au cœur de la commune. « Ce couvent, qui était jusque-là propriété de l’hôpital de Voiron, représentait un enjeu d’aménagement fort pour notre mandat. Son jardin pouvait jouer le rôle de troisième parc de la commune, nous cherchions par ailleurs un emplacement pour bâtir une nouvelle école maternelle. Et au-delà, l’architecture très singulière de ce bâtiment du XIXe siècle en fait un joyau du patrimoine municipal, mais ce joyau était en péril ». 

Adrienne Perves poursuit : « Ce sont les agents du Département qui nous ont parlé de l’accompagnement que le CAUE pouvait réaliser, notamment pour recruter un architecte du patrimoine, un profil indispensable au regard du contexte. Notre objectif était de préserver d’urgence le bâtiment, pour à terme en faire un lieu d’animation de la commune. L’expertise du CAUE nous a permis de cadrer le cahier des charges et son appui s’est poursuivi pour sélectionner le lauréat. Le regard du CAUE a été particulièrement précieux pour définir les lots techniques de ce marché de maîtrise d’œuvre. Scinder la mission s’est révélé judicieux au regard de la suite ». 

L’achat du convent des Dominicains s’inscrit dans une démarche globale que les élus de Coublevie ont dénommé Projet cœur de village. Il s’agit pour eux de dynamiser le cœur bâti de la commune, à travers des opérations d’aménagements successives mêlant équipements publics et lieux de rencontre, logements séniors et commerces. 

La première étape de ce projet a été la construction en 2024-2025 d’une école maternelle, dans le couvent des Dominicains : « Depuis une trentaine d’années, il n’y avait à Coublevie qu’une seule grande école qui avait été bâtie pour remplacer plusieurs écoles de quartier. De ce fait, lorsqu’on s’installe à Coublevie en tant que jeune parent, on est immergé tout de suite dans un grand bain de sociabilité en rencontrant de nombreux parents à la sortie de l’école. Mais il y avait nécessité de créer de nouvelles classes. Grâce à l’achat du couvent, nous avons pu construire une nouvelle école à deux pas du pôle scolaire existant, en préservant cette dynamique de rencontres ». 

Le CAUE a également été associé à cette démarche au moment du concours de maîtrise d’œuvre, en intégrant le jury : « Le projet lauréat a été choisi à l’unanimité, et les retours que nous font les parents d’élèves sont très positifs. C’est un bel objet architectural, parce qu’il allie qualité fonctionnelle et soin dans l’intégration à son environnement ». 

Cette attention à la qualité de l’intégration des nouvelles constructions est un axe politique fort pour Adrienne Perves : « Je suis attristée de voir que, dans nos territoires, il y a un respect de l’architecture vernaculaire qui n’a pas toujours été bien mis en œuvre. Nos paysages ont été parfois assez peu préservés, et pour ma commune, je veux une architecture qui sache s’inspirer de son contexte ». 

Cette sensibilité provient peut-être de son parcours : « Je suis iséroise de naissance, mais j’ai habité par la suite dans des endroits très différents en France avec mes parents. Il s’agissait de régions assez typées, pour moi très belles avec une architecture très marquée ». Elle en a tiré une véritable philosophie politique : « Je pense que c’est dans le beau qu’on élève des belles personnes. Le désarroi psychologique qui touche parfois les individus, il est aussi amplifié par un environnement dont on n’a pas pris soin. Soigner le cadre de vie de mes administrés, ce n'est une politique accessoire ».  

Cette exigence d’intégration a servi de fil rouge lors de la révision du PLU : « L’ancien PLU permettait des toits sans débords, et pour moi, c’était très problématique. Les façades des nouvelles constructions de ce fait n’étaient pas protégées et des coulures sont souvent apparues par la suite. Ça peut paraitre être un détail, mais pour moi des façades préservées participent à la qualité de notre environnement bâti ». 

Adrienne Perves poursuit, illustrant l’enjeu de tenir cette exigence : « L’ancien PLU autorisait les toitures noires, au-delà de l’avis esthétique, c’est un désastre au regard du dérèglement climatique. Aujourd’hui, le PLU intègre un nuancier de couleurs pour les toitures, comme les façades. Ce n’est pas simple à tenir et je vous confirme que l’élu sur la commune qui est le plus soumis à la tension des administrés, c’est mon adjoint à l’urbanisme. Mais ça nous semble essentiel. Par ailleurs, nous avons relativement peu d’agents municipaux, mais nous avons lancé des recrutements après avoir été élus, justement pour mieux piloter les projets d’aménagement. Dans le cadre du projet d’habitat sénior, nous avons organisé en régie un appel à projets. Dans notre discussion actuelle avec le lauréat, nous négocions pour tirer au plus haut la qualité architecturale du projet ». 

Ce travail de longue haleine est aussi celui qui donne satisfaction : « Ce qui me rend heureuse en tant que maire, c’est de voir tous les projets qui émergent. Dans ma vie professionnelle, on ne voit le fruit de son travail, potentiellement si ça marche, que quinze à vingt ans plus tard. En mairie, en trois ou quatre ans, on peut voir des résultats. Au-delà, je trouve que travailler en tant qu’élu municipal est très stimulant. Mener le travail de fond sur le PLU était passionnant. Il y a dans le mandat de maire à la fois une diversité des sujets, mais aussi une dimension très opérationnelle de ces sujets. On cherche à améliorer la vie des administrés au jour le jour. En termes de ‘’sens au travail’’, c’est quand même particulièrement intéressant ». 

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